Dépôt d’archives d’une écrivaine et artiste acadienne méconnue
FAKE NEWS
Un matin pluvieux à Moncton, je me suis retrouvée seule devant une boite d’archives ayant appartenu à une femme qui s’appelait Roselyne Albert. Je découvrais l’existence de cette femme à travers ce qui restait de sa vie, de son écriture, de son art. J’étais émue devant ces objets qui représentaient la vie d’une femme qui n’était plus parmi nous.
En effet, la sœur de Roselyne avait entendu parler de mon groupe de recherche sur les archives et les femmes en Acadie (GRAFA) lors d’une émission radiophonique à Radio-Canada Acadie et avait pensé que les archives de sa sœur pouvaient potentiellement nous intéresser. C’était sa manière de faire revivre sa sœur après l’avoir perdue en pleine pandémie en valorisant la matérialité restante de Roselyne. Nous pensons souvent à la procréation des femmes, mais nous pensons trop peu à la création de celles-ci… notamment leurs œuvres de création.
En mesurant l’importance de ne pas passer sous silence la création de Roselyne, j’ai demandé à mon collègue Joël Boilard de m’aider à découvrir les objets inédits à l’intérieur de cette boite puisque l’un des objets était un recueil de poésie signé par mon collègue à la retraite, Maurice Raymond. Étant l’héritière de son ancien bureau de travail à l’université, la boite a été livrée dans son ancien bureau et c’est à partir de cet espace que je rédige ces mots.
Le livre signé par Maurice Raymond me rendait perplexe. Est-ce que Roselyne était l’autrice réelle de ce recueil ? Joël ayant bien connu Maurice, je me suis tout de suite sentie en confiance d’aller le consulter. De plus, il y avait des traces de correspondances entre Roselyne et Gérald Leblanc. Il fallait donc rapidement impliquer mon collègue Benoit Doyon-Gosselin afin de déterminer la portée de ces lettres.
Le fonds d’archives de Roselyne Albert est encore en processus d’évaluation par mes collègues et moi-même afin de mieux saisir le potentiel en recherche de celui-ci. Dans la boite, nous retrouvons des papiers épars, des textes, un floppy disk, une copie d’un recueil de poésie La Soif des ombres publié sous le nom de Maurice Raymond, des correspondances avec Gérald LeBlanc, ainsi que des œuvres picturales.
C’est en plongeant dans les traces archivistiques de Roselyne que mes collègues littéraires et moi-même avons souhaité lui consacrer un hommage afin de sortir du silence cette écrivaine et artiste multidisciplinaire acadienne. Nous souhaitons réfléchir de manière critique à l’effacement des femmes tout en soulignant l’importance des archives de femmes pour les études acadiennes.
Isabelle LeBlanc
professeure adjointe en sociolinguistique au Département d’études françaises de l’Université de Moncton
publié dans le numéro 38. Hommage à Roselyne Albert