Jonathan Roy. soaking trempe (nique à feu) 

Guy Arsenault, gouache, 1990 (Droits de reproduction : Maryse Arseneault)

je l’sais pas djâbe 
plus qu’un autre 
pourquoi à soir a d’l’air 
de prendre l’eau 
pourquoi nos noms shinent dans l’suage 
entre les cils lâchés du châssis 
 
les brûlots sont fauves  
la peau te feule 
pour te défaire 
et je sheer du câlisse 
dans tes yeux trempes 
 
je l’sais djâbe pas 
 
ça doit être à cause 
des morceaux de screen 
arrachés dans la nuit 
par le chat jamais revenu 
lancé dans l’univers 
présumé mort mon doux 
depuis avant notre temps 
 
mais t’sais god knows 
pis je l’sais djâbe pas plus 
 
mais au moins ça laisse rentrer 
la bonne air 
autant que ça me démange 
de dire au divan de faire ses griffes 
ailleurs que sur nous autres 
la prochaine fois 
 
même si on est faite fort 
même si c’est ok d’brailler 
même si ça me démanche 
de savoir mais 
 
je l’sais djâbe pas dans l’fond 
 
on était même pas encore arrivés  
la dernière fois 
que la chambre a été refaite 
 
dans les murs on aurait trouvé :  
du bran de scie l’évangéline 
des pipes de copper  
un baggy de moisi 
des vides bues à la presse 
nos vices cachés avant notre arrivée 
dans la toux noire de la tapisserie 
 
l’humidité sent la cave 
l’odeur de smoke par gros soleil 
les silements ressemblent au vent 
le feu remplace les bronches 
les symptômes dans le tapis 
 
mais c’est ok d’brailler 
 
entre les moins bonnes journées 
une bonne journée je 
finirai bien par bien finir  
la job que j’avais commencée 
 
par me refaire  
par me ramasser 
 
je suis un mess mais je 
 
finirai bien par l’absorber 
par le boire jusqu’au rose 
des yeux presqu’à juin  
par me laver à la hose 
mes bleus presqu’à jeun 
 
jusqu’à détremper mes tissus 
ma charpente mal framée 
mes faiblesses aux seize pouces 
for we are made of old kleenex 
 
mais un jour je  
finirai par casser 
la fenêtre qui me seal de 
filer la pluie  
 
je finirai  
par lâcher  
que finalement j’aime ça  
quand-ce que l’averse nous détrempe 
pis la manière que la pluie nous déforme 
par la vitre quand-ce qu’on se regarde danser 
dans le mascara coulé 
soakés d’brailler 
au milieu du lawn 
la joie à boire deboute 
 
un hard reset  
chenous  
c’est ok d’brailler 
 
quand même rances les silences 
défilés m’émeuvent 
quand l’air de d’hors démange 
quand les nerfs raboutés font de leur mieux 
pour garder la chaux sur les murs 
 
loin des peaux trempes 
de sueur de peine pis d’misère 
 
pis écoute la shot :  
le squall passé à travers d’auto-tune 
la saison des feux à travers du screen 
ont brulé des cicatrices dans mon poil 
enjambent l’hiver s’enfargent 
dans les boutes à joindre 
les fleurs dans l’tapis 
la musique dans l’tapis 
les restes à poubelle 
 
pis check par la vitre check 
le ciel c’est tu pas beau assez écoute  
la toune c’est tu pas 
beau assez  
 
pareille 
 
la manière que les étoiles 
déchirent dans nuit  
c’est tu pas beau assez  
pour passer au travers 
 
partir de chenous pour se rendre 
jusqu’à chenous 
 
quelque chose comme ça 
de doux comme un chien qu’on a aimé 
comme un chien qui reviendrait 
juste pour dire que  
 
rendu là nos rages  
auront peut-être mis les habits noirs 
de leurs fatigues mais que 
nos yeux  
garderont le tranchant 
de la broche après les cutters 
 
et on dira encore rage 
mais on voudra dire  
peine 
 
comme on plante l’épouvantail 
pour dire la peur de la faim 
 
comme le mycélium jeûne en attendant 
un prochain locataire à digérer 
 
entre l’humus et les loyers passés dûs 
entre le terrain vague et le ménage à finir 
dans le fridge pis dans la gorge 
les projets passés date pis 
 
rendu là la lumière 
prendra peut-être position contre 
toute attente entre  
un socket lousse  
et le gamble d’un fil mal isolé 
 
un hard reset 
 
chenous aura raison 
de chenous 
 
je l’sais djâbe pas 
c’est ok d’brailler 
écoute la toune 
encore 

JONATHAN ROY.

Texte publié dans le No 41. HABITÉ.E.S

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