Une préface à Cris de terrestres
Derrière le micro ou le piano, Raymond Guy LeBlanc, auteur de Cri de terre, verbalisait sa profonde appartenance à la sphère terrestre. La vase de la Petitcodiac, les ailes battantes, les rayons de pluie, le déplacement des coroles : RGL avait l’œil loquace et la sensibilité fine.
« enfant prodige artiste dans l’âme »
Herménégilde Chiasson
À l’époque où je préparais le tournage de Kacho Komplo, un documentaire sur l’iconique bar étudiant de l’Université de Moncton, j’ai feuilleté Cri de Terre, ce recueil nécessaire qui a ouvert ben des oreilles, afin d’y sélectionner un texte qui serait « performé » à l’écran par Marie-Jo Thério. Ben sûr, fallait j’m’arrête sur l’épilogue et son poème « Je suis Acadien » (« Saignant medium rare »), un texte vigoureux, punk, décâlissé qui s’insérait parfaitement dans le montage maquisard que j’envisageais.
« c’était quoi ça, un rebelle acadien »
Henri-Dominique Paratte
En cherchant un poème de RGL à faire lire par Marie-Jo, j’aurais aussi pu choisir « Levate Spirimer Populo », avec la déconstruction radicale de son langage (« la banniérine ventorlopante »), ou « Néons », ce cheminement électrique dans la nuit urbaine (évoqué par A. Fleury dans sa contribution à ce numéro).
Le poème éponyme « Cri de Terre », doté de son fameux premier vers incantatoire « J’habite un cri de terre aux racines de feu », était tout aussi difficile à écarter.
Fertile, ce recueil !
Cinquante orbites après sa publication, douze auteurs et autrices qui ont connu, lu, entendu Raymond Guy LeBlanc font écho aux convictions thématiques du chantre acadien et tentent, chacun et chacune, de trouver la porte de sortie du solitaire.
« de ton cri nous chantons nos racines »
Marc Arseneau
Pour ce numéro, la contrainte — car il est bien connu qu’ici, à Ancrages, nous raffolons des contraintes— n’était pas du tout exigeante : les participant.e.s n’avaient qu’à intégrer un vers de Cri de Terre dans leur texte, versant dans l’échantillonnage poétique. Pour les aider dans leur tâche, mon collègue Jean-Pierre Caissie a compilé une liste de dix-huit vers candidats puisés à même le recueil.
« Ma douleur a couleur de fleuve étrange »
Raymond Guy LeBlanc
Dans ces pages où Raymond Guy lui-même apparait à quelques reprises, les vers fortifiants de l’horticulteur poétique de Saint-Anselme nourrissent de nouvelles pousses aux couleurs et aux textures envoûtantes : appréciations, évocations, inspirations et conjurations qui chassent si habilement cet autre mot en ‘-tion’ contre lequel RGL s’est opposé tout au long de son sidérant trajet littéraire : l’aliénation.
Heureuse mouvague,
Paul Bossé
publié dans le numéro 33. Cris de terrestres