Comme je t’aime la Terre
Qui volcanise à Fagradalsfjall
Et qui inonde à Sydney
Naguère, tu pétais à Fukushima
Là où d’autres gros jets eurent lieu
Moins heureux moins heureux
Toi qui fumeroles de joie
Et rases forêts et villages
Et nous boucanes en diable
Comme j’aime l’idée
De ta fine croute
Un al dente d’écorce
Et tout aussi ceci
Ton cœur de feu
Ton corps gracile
Ton joli chaos
Qui nous met K.O.
Et nous énuclée
Comme j’aime l’idée de
La théorie de la Terre
De Buffon au Jardin du Roy
Une grosse roche
Ronde qui tourne
Et s’use dans l’espace
Comme j’aime l’idée
Du météore géant
Qui anéantit le T-Rex
Et qu’un pas de côté du cerf
Dérange durablement
Une colonie de fourmis
Et que des tractopelles
Rasent une montagne
Pour créer une plage
Et qu’un couronné virus
Te dicte la marche
(ou crève) à suivre
Et que des poètes
Inlassablement
Poétisent à tout vent
J’aime quand tu baves
Quand tu submerges
Quand tu brûles
Ô tes belles coulées
Ô tes beaux glissements
Progressifs du plaisir
Ah les belles tornades
Ah les beaux cyclones
À la Jamaïque
Tes nuages que
Je ne traverse plus
Tes vents furieux
Ô tes arcs-en-ciel
À la fierté gay
Qui bandent l’horizon
Je t’attends tremblement
De terre de pied ferme
Debout dans le chambranle
Ah non tu ne secoues
Plus rien tu t’en fous
Quel grand dommage
La boule indigo
La machine ronde
La boule à zéro
Le tournis tu me donnes
Le tournis d’un château
L’autre la tête me tourneboule
Tu fuses tu fizzes
Tu révolutionnes
À tout crincrin
Tu fumes en volutes
Grises âcres rêches
Tu roules au gaz
Tu nous geysères
Tu nous culbutes
Tu nous inondes
Tu nous enroules
Dans ta houle
Soute et voute
Tu nous enrages
De géants orages
Qui nous engrêlent
Et tu solstices
Et tu équinoxes
Et tu bissextiles
Et tu fonces
Et tu défonces
Et tu enfonces
Terre attirante
Terre attractive
Terre attrayante
Allô la Terre
M’entends-tu
Je te parle
Si jamais te fustige
Envoie-moi donc Pan
Le dieu de la fessée
Texte publié dans le No. 29 Éloge (paradoxal)