tes blessures dorment dans mon sang
comme une portée de chiots
noyés avant l’hiver
les nommer serait inutile
alors tu pries pour la rivière
*
tu pries dents serrées
retiens tes larmes entre froid et fatigue
l’intérieur de tes joues mordu d’ulcères
de trop d’excuses trop de défaites
tu pries à faire chienne ta soif
*
tu coules sous nos langues
l’or impur des joncs
sculpte nos têtes et le trou dedans
un nid d’anges rampants
donne vie
à la glaise de nos églises
*
tu m’apprends
à dessiner des soleils
et des cœurs aux formes impossibles
les traits du père
convergent en un point précis
un nœud de nerfs où naît
le premier battement
nommé amour
*
à bout d’encre et d’électricité
tu prends la mesure
de la catastrophe
nous avons tous les âges de l’abandon
et l’art infus du sabotage
c’est ainsi trahir, toujours intime
Émilie Turmel
Texte publié dans le No.22 Libéré(e)s sur parole : la récidive